Joris Clerté, mentor de Prudence et également infographiste, compose une musique très
imagée. A la fois dense et épurée, elle évoque une forêt immense où les multiples espèces végétales et animales séparpillent sur toute la surface. Mumsmums redonne un air authentique et aventurier à lélectro-pop française, là où de célèbres Versaillais sadonnent à la conquête des charts. Ainsi, tout un monde onirique séveille ici. Certains chœurs évoqueraient en cela les habiles Mercury Rev de Deserters song. Après avis de lintéressé, ce serait plutôt linfluence des chants liturgiques du 15ème siècle ! Le Ennio Morricone de la B.O. de Il était une fois dans louest sinvite pour apporter «de lespace» aux 15m2 de limmeuble parisien où a été enregistré cet album. Polyglotte, instrumental et surtout pop (notamment A tort ou à raison, très Françoise Hardy), Mumsmums respire lappétence. Il a en tout cas redonné le goût de la liberté à Joris, après un premier essai chez la major Sony il y a cinq ans.
Ton pseudo sonne comme une piqûre de rappel
Prudence est effectivement un peu un pense-bête, ça permet de réfléchir à deux fois sur un choix à faire. On oublie complètement ce nom sauf quand la météo te rappelle « Prudence sur la route » ou en hiver « Prudence en montagne ». Jaime lidée dêtre partout à la fois.
Projettes-tu un film musical ou souhaites-tu que lauditeur improvise ?
La seconde hypothèse me semble incontournable : je ne suis pas sûr que la musique évoque des images précises comme dans un livre. Pour illustrer ceci, écoute Matière grise de deux façons : ça parle dune fausse-couche ou dun âne. Les deux fonctionnent et il doit y en avoir dautres, à vous de jouer
Tes influences musicales sont bigarrées
Je pioche dans des trucs que je nécoute pas ou en contradiction musicale avec le morceau sur lequel je travaille. Je peux partir sur des pistes musicales qui ne me ressemblent pas, mais je sais que je retomberai sur mes pieds.
Vincent Michaud
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Nos disques préférés cette semaine
Dans un genre très différent et nettement moins boule à facettes, la pop du groupe français Prudence brille également par sa singularité. Mélange dacoustique et délectro, de petites chansons toutes en finesse et dinstrumentaux colorés, cet album plutôt joyeux, plein dhumour et de dérision, simpose comme un bon remède quand les jours semblent tourner en noir et blanc sur la capitale et ses banlieues. Le disque sappelle Mumsmums (chez Discograph), miam-miam en suédois
Prenez-en une tranche !
Philippe Blanchet
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Focus, Prudence - Surprise surprise
Tôt ou tard, on savait quon allait recroiser la route de Prudence. Certes, on ignorait encore, à lépoque dun premier album éponyme à moitié réussi, mais singulièrement enjoué, que Joris Clerté, la tête pensante et chantante de ce groupe à géométrie variable formé avec Emmanuel Enault en 1996, était un fan de Mike Oldfield. Sur le sujet, lhomme à lanneau de corsaire et à la langue bien pendue est intarissable, presque autant que sur ses déboires avec Sony, la major qui le signa sur la foi dun maxi autoproduit (La Bonne Humeur) remarqué dans le Landerneau, alors en pleine obsession dune pop à la française. « Il y a cinq ans, cétait le bon temps », plaisante-t-il aujourdhui, après avoir trouvé refuge sur la petite structure parisienne Telescopic. « La question qui sest posée était de savoir si on allait revenir sous le même nom. De toute façon, comme disait Robert Hue à propos des communistes à lépoque ou il était question quils se rebaptisent, on nous aurait appelés les ex-Prudence ». Aujourdhui méconnaissable, Prudence sied par son mutisme relatif on ne dénombre que cinq chansons sur quatorze morceaux, dont trois sont interprétés par des invités dici et dailleurs (la Française Armelle Pioline dHolden, lAnglais Ed Combes, clavier de Supergrass et lItalienne Betina Kee) -, sa variété de ton(alités), son charme polyglotte, sa légèreté débonnaire (Grizzly Fidèle), sa fluidité gracieuse (Tocando La), sa mise en son panoramique (Contact Saloon).Par moments, on a même limpression dentendre une boîte à musique, dont les mélodies graciles épouseraient les teintes pastel de la pochette signée Bérangère Lallemant (la dulcinée de Joris), qui figure parmi les plus belles réussites graphiques du moment. Une résurrection narrivant jamais seule, Joris et les siens travaillent déjà à la suite de Mumsmums, titre imprononçable en forme donomatopée trouvée par une copine suédoise après un goûteux repas. Sils ont choisi de revenir à une forme chantée, Joris et Emmanuel ne perdent pas de vue que Prudence reste avant tout un projet récréatif, ce qui ne minore pas son importance à leurs yeux et ninterdit pas non plus leurs ambitions mâtinées de contraintes matérielles (lespace-temps). Enregistré à des heures vespérales et en marge des activités professionnelles de chaque musicien, Mumsmums reflète bien la poésie naïve et onirique de son auteur principal, que certains ont déjà pu voir sans le savoir à travers ses habillages graphiques pour Arte (www.doncvoila.net). A linstar du slogan historique de la chaîne franco-allemande, laissez-vous étonner par Prudence.
Franck Vergeade
Jusquà présent, il faut bien lavouer, Prudence portait bien mal son nom. Depuis près de six ans, on était toujours en train de sinterroger sur les motifs qui avaient poussé Joris Clerté, ex-débutant prometteur, auteur de démos ayant suscité, en leur temps, une curiosité bienveillante, à sortir un premier album mitigé de pop mignonnette sur une major, et à se retrouver, de facto, sous la coupe dun partenaire industriel aux attentes et aux exigences forcément décalées par rapport au potentiel commercial de chansons sympathiques mais encore pataudes. Clerté aura payé au prix fort cette imprudence inaugurale. Désormais convaincu quil ne pourrait exercer son modeste apostolat de bricoleur de notes en toute tranquillité que sur une structure plus sensible aux charmes atypiques de ses petits mobiles sonores, il parvient à faire le meilleur usage de cette liberté fraîchement conquise. Il en profite alors pour élaborer enfin un monde faussement naïf, vraiment original, où le dépouillement des arrangements et le recours aux motifs minimalistes dinstruments-jouets comeladesques naltèrent jamais la richesse dun propos dense, que lon devine mûrement réfléchi. Avec ses mélodies et ses rythmes brisés, ses petites poésies polyglottes et souvent rigolotes, Mumsmums possède une joie et un élan communicatifs. On sy déguise en cow-boy (Contact Saloon), en trappeur (Chasse Gallery) ou en chanteur de variét ritale (Lunatika), avec un sens du jeu et de lhumour bienvenu. Autrement plus efficace pour retrouver avec nostalgie son enfance trop vite évaporée quune soirée avec Casimir.
Matthieu Grunfeld
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Pour dire « miam miam » en suédois, on dit « mums mums ». Cest le titre qua choisi Joris Clerté pour le deuxième album de Prudence, cinq ans après un premier disque que lon avait classé quelque part entre William Sheller et Dominique A. Ici, on serait plutôt entre la Björk hivernale et douillette de Vespertine et les précautions denfant têtu de Pascal Comelade. Il y a de vraies chansons et des plages instrumentales, des instants de pureté (une guitare, une voix, quelques gestes ténus) et des buissons qui entremêlent couches et fils musicaux, bribes de dialogues et jouets denfant. Résolument inclassable, ce disque est à la confluence de dix orientations possibles dans la musique daujourdhui. Ainsi, dans le court Paroles dhonneur, on entend une gouaille à la Renaud, le mépris de soi de Miossec, le détachement formel dun Dominique A, la sophistication sonore dun Bashung épaulé par Jean Lamot
Evidemment, se pose la question de lautonomie de ce disque par rapport à son époque, de la pérennité de ce son une fois que ce sera dissipée la séduction de nouveauté des apparentements imprévisibles que libère massivement lélectronique (les cadavres exquis ne sont-ils pas ce qui a le plus mal vieilli de tout le surréalisme ?). Sans que lon puisse évidemment trancher en cette matière, il faut reconnaître à Prudence une liberté dinspiration et de parenté qui tend à démontrer que la démarche artistique est sincère, réelle et libre. ****
Bertrand Dicale
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On pourra bientôt commencer à compiler les interventions dArmelle Pioline, parallèles au groupe Holden. Pour continuer de lentendre respirer au coté de Jean-Louis Murat ou sur la guitare de Thomas Dutronc. Car dès quelle est là, les chansons adoptent une tonalité aux attraits opaques, insidieux. Pourquoi dailleurs se laisse-t-on prendre puisque sa voix na rien dépoustouflant ? Cest justement loin du clinquant que tout se joue, dans la beauté des choses banales, dans le charme accidentel des premières fatigues, timbre traînant, légèrement grave, distancié, avec cette pointe de dédain quarborent comme un voile de protection ceux qui ont déjà trop pris. Alors, elle apparaît sur la troisième plage du deuxième album du trio Prudence, et on tend loreille au moment de sassoupir dans le confort instrumental. Cest une chanson toute simple, pleine de points dinterrogations. Entre les lignes dinstruments-jouets, un joli jeté naïf électro-pop, style Yann Tiersen. Les petites mélodies matinales de Prudence sont attachantes, pourtant on sagacerait que ces jeunes gens doués se satisfassent si vite deux-mêmes. Sils restent en surface cest probablement parce quils se soucient trop de ce quon pensera deux. Et parce quils craignent de paraître mièvres, la première phrase de leur histoire, cest une copine qui la chante à leur place.
Ludovic Perrin
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Pop enfantine : Prudence
Collectif placé sous la houlette de Joris Clerté, Prudence vient de signer un deuxième opus, proche d'une BO pour comédie musicale inconnue, légère, mais pas innocente, à base d'instruments pour gamins et d'instrumentaux cinématographiques.
Nul besoin d'une quelconque mise en garde avant l'écoute de l'album de Prudence, le gourmand Mumsmums. Riche en surprises et en idées, minimaliste par ses choix esthétiques, cet album se compose de ballades instrumentales ou chantées (dans différentes langues). Idéal pour habiller musicalement un film rétro futuriste, qui se déroulerait quelque part entre les 60's et aujourd'hui. Pas anodin, la présence ici d'Olivier Libaux, auteur de la vraie fausse comédie musicale audio L'héroïne au bain. Sur Mumsmums, chez Libaux, tout comme chez Jacques Demy, on parle en chantant, on se questionne quant aux directions prises dans sa vie : "Choisir le oui ou bien le non/Soit la montagne soit l'horizon" (À tort ou à raison). Ceci sans omettre de glisser quelques touches d'humour : "Matière grise en réunion de cellule/Décision prise et jamais ne recule" (Matière grise). Les nombreux participants à Mumsmums jouent du xylophone, de l'accordéon, de la batterie ou des instruments jouets (piano, guitare), comme Pascal Comelade, référence principale.
Avec ses envolées hispanisantes (Contact Saloon), ses chansons en italien (Lunatica), ses réminiscences enfantines (Tocando La), ses perturbations électroniques et ses samples divers, Prudence fait de la pop "marshmallow", multicolore et appétissante.
Prudence
"À la base, je suis réalisateur, mais j'ai commencé la musique vers 18 ans, plus attiré par la chanson. J'ai fait un 4 titres autoproduit en 1996, puis j'ai signé chez Sony en 1997 et sorti un album éponyme en 1998 sous ce même label. Mumsmums est le second disque de Prudence, mais chez un indépendant. "
La musique
"Souvent je viens avec une idée simple, un riff, un bout de mélodie, puis nous construisons le reste du morceau ensemble, avec mon comparse Emmanuel Enault, avec une guitare et un carillon ou un petit clavier qui sonne faux, mais dont le son nous touche. Pour le reste de la production, nous travaillons par couches, comme un château de cartes. Nous avons beaucoup employé la boîte à rythme à cause d'une part d'un problème de place (va installer une batterie dans 15m2 dans un immeuble parisien !), et d'autre part parce que nous manquons un peu de rigueur métronomique. Avec les programmations, pas de problème de fluctuation du tempo
Nous trichons comme tout le monde, en utilisant des samples. Nous cherchons, nous farfouillons
Cela nous amène sur des choses hasardeuses et le hasard a souvent du talent, c'est très excitant. En revanche, pour contrebalancer, nous appelons des musiciens (des vrais), pour assouplir, pour réchauffer. Tout ça est une histoire d'équilibre. "
La chanson
"La chanson est plus concrète, on y place plus facilement un message. Je tire plus des textes sur mon entourage que sur moi-même. Quand je parle de moi, j'ai plutôt tendance à écrire en négatif. Paroles d'honneur en serait un exemple. "
Emmanuel Dosda
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A titre déroutant, disque surprenant. Pour ce nouvel album, Prudence a radicalement changé d'ambition musicale. Si le premier opus du groupe de Joris Clerté prenait la forme dune quête acharnée de la chanson pop francophone parfaite, ce nouvel arrivage fait plutôt le pari d'une inspiration débridée et du débordement des carcans musicaux. Aussi, les 14 chansons qui composent le disque apparaissent-elles comme autant de cartes postales rêveuses affranchies des règles inhérentes au traditionnel format pop. Quasiment entièrement instrumentale, cette collection d'enluminures très ouvragées révèle un savoir-faire musical certain. Pourtant et malgré cette complexité des arrangements et de la production, les chansons sont imparables, évidentes. Au fil de l'écoute, les références fusent et s'entremêlent, ici les Beach Boys et les Nits, là Migala ou encore Pascal Comelade. Finalement, ce que Prudence a perdu en loquacité, le groupe l'a gagné en finesse et en sens de l'à-propos instrumental. Il faut néanmoins noter que les morceaux chantés sont particulièrement bien troussés, preuve que l'économie des mots peut être parfois salutaire à la pertinence des idées (on pense à particulier à cet envoûtant "A tort ou à raison" chanté par Armelle Pioline, chanteuse de Holden).
Définitivement étonnant, ce disque a la saveur des oeuvres à tiroirs qui permettent à chaque auditeur de faire sa propre lecture des aspirations de l'auteur. Réussi.
Refau
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A clip magnifique chanson superbe, qui en plus de distiller une mélodie minimaliste pas chiante fait la part belle à Armelle Pioline de Holden. Le reste de l'album Mumsmums, majoritairement instrumental, vaut également le détour.
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Prudence, groupe français à géométrie variable monté autour de Joris Clerté (et bénéficiant ici de talentueux invités : Mocke et Armelle Pioline de Holden, Olivier Libaux,
), délivre avec Mumsmums un petit bijou de pop délicate, qui nous rassure sur les envies d'harmonies et de beauté des musiciens d'ici et aujourd'hui. Avec ses vignettes ludiques et finement ouvragées, entre Etienne Charry simple, Ennio Morricone cheap et Pascal Comelade gai, ce deuxième album relève le défi d'une production française de qualité, qui ne se chante pas forcément. Pas très loin des vignettes instrumentales des Beach Boys, les 14 titres de Mumsmums se déclinent avec ou sans voix, toujours pour le meilleur du son et de sa répartition dans l'espace. Coloré, colorié et dessiné précautionneusement, A tort ou à raison par exemple est une belle réciprocité entre musique graphique et images musicales (chanté par Armelle Pioline et clippé par Joris). On regrettera juste parfois les inserts électroniques, moins jolis que les jouets d'enfants, dans ce foisonnement harmonieux de textures lumineuses. Quand il s'épanouit et laisse au silence ses intervalles, ce disque fait du bien aux oreilles.
Wilfried Paris
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