logo prudence


Longueur d’ondes - Février/Avril 2004


Joris Clerté, mentor de Prudence et également infographiste, compose une musique très… imagée. A la fois dense et épurée, elle évoque une forêt immense où les multiples espèces végétales et animales s’éparpillent sur toute la surface. Mumsmums redonne un air authentique et aventurier à l’électro-pop française, là où de célèbres Versaillais s’adonnent à la conquête des charts. Ainsi, tout un monde onirique s’éveille ici. Certains chœurs évoqueraient en cela les habiles Mercury Rev de Deserter’s song. Après avis de l’intéressé, ce serait plutôt l’influence des chants liturgiques du 15ème siècle ! Le Ennio Morricone de la B.O. de Il était une fois dans l’ouest s’invite pour apporter «de l’espace» aux 15m2 de l’immeuble parisien où a été enregistré cet album. Polyglotte, instrumental et surtout pop (notamment A tort ou à raison, très Françoise Hardy), Mumsmums respire l’appétence. Il a en tout cas redonné le goût de la liberté à Joris, après un premier essai chez la major Sony il y a cinq ans.

Ton pseudo sonne comme une piqûre de rappel…
Prudence est effectivement un peu un pense-bête, ça permet de réfléchir à deux fois sur un choix à faire. On oublie complètement ce nom sauf quand la météo te rappelle « Prudence sur la route » ou en hiver « Prudence en montagne ». J’aime l’idée d’être partout à la fois.

Projettes-tu un film musical ou souhaites-tu que l’auditeur improvise ? La seconde hypothèse me semble incontournable : je ne suis pas sûr que la musique évoque des images précises comme dans un livre. Pour illustrer ceci, écoute Matière grise de deux façons : ça parle d’une fausse-couche ou d’un âne. Les deux fonctionnent et il doit y en avoir d’autres, à vous de jouer … Tes influences musicales sont bigarrées… Je pioche dans des trucs que je n’écoute pas ou en contradiction musicale avec le morceau sur lequel je travaille. Je peux partir sur des pistes musicales qui ne me ressemblent pas, mais je sais que je retomberai sur mes pieds.

Vincent Michaud
--------------------------------------


Zurban - 4 Février 2004


Nos disques préférés cette semaine …
Dans un genre très différent et nettement moins boule à facettes, la pop du groupe français Prudence brille également par sa singularité. Mélange d’acoustique et d’électro, de petites chansons toutes en finesse et d’instrumentaux colorés, cet album plutôt joyeux, plein d’humour et de dérision, s’impose comme un bon remède quand les jours semblent tourner en noir et blanc sur la capitale et ses banlieues. Le disque s’appelle Mumsmums (chez Discograph), miam-miam en suédois… Prenez-en une tranche !

Philippe Blanchet
--------------------------------------


Magic - Février 2004


Focus, Prudence - Surprise surprise
Tôt ou tard, on savait qu’on allait recroiser la route de Prudence. Certes, on ignorait encore, à l’époque d’un premier album éponyme à moitié réussi, mais singulièrement enjoué, que Joris Clerté, la tête pensante et chantante de ce groupe à géométrie variable formé avec Emmanuel Enault en 1996, était un fan de Mike Oldfield. Sur le sujet, l’homme à l’anneau de corsaire et à la langue bien pendue est intarissable, presque autant que sur ses déboires avec Sony, la major qui le signa sur la foi d’un maxi autoproduit (La Bonne Humeur) remarqué dans le Landerneau, alors en pleine obsession d’une pop à la française. « Il y a cinq ans, c’était le bon temps », plaisante-t-il aujourd’hui, après avoir trouvé refuge sur la petite structure parisienne Telescopic. « La question qui s’est posée était de savoir si on allait revenir sous le même nom. De toute façon, comme disait Robert Hue à propos des communistes à l’époque ou il était question qu’ils se rebaptisent, on nous aurait appelés les ex-Prudence ». Aujourd’hui méconnaissable, Prudence sied par son mutisme relatif – on ne dénombre que cinq chansons sur quatorze morceaux, dont trois sont interprétés par des invités d’ici et d’ailleurs (la Française Armelle Pioline d’Holden, l’Anglais Ed Combes, clavier de Supergrass et l’Italienne Betina Kee) -, sa variété de ton(alités), son charme polyglotte, sa légèreté débonnaire (Grizzly Fidèle), sa fluidité gracieuse (Tocando La), sa mise en son panoramique (Contact Saloon).Par moments, on a même l’impression d’entendre une boîte à musique, dont les mélodies graciles épouseraient les teintes pastel de la pochette signée Bérangère Lallemant (la dulcinée de Joris), qui figure parmi les plus belles réussites graphiques du moment. Une résurrection n’arrivant jamais seule, Joris et les siens travaillent déjà à la suite de Mumsmums, titre imprononçable en forme d’onomatopée trouvée par une copine suédoise après un goûteux repas. S’ils ont choisi de revenir à une forme chantée, Joris et Emmanuel ne perdent pas de vue que Prudence reste avant tout un projet récréatif, ce qui ne minore pas son importance à leurs yeux et n’interdit pas non plus leurs ambitions mâtinées de contraintes matérielles (l’espace-temps). Enregistré à des heures vespérales et en marge des activités professionnelles de chaque musicien, Mumsmums reflète bien la poésie naïve et onirique de son auteur principal, que certains ont déjà pu voir sans le savoir à travers ses habillages graphiques pour Arte (www.doncvoila.net). A l’instar du slogan historique de la chaîne franco-allemande, laissez-vous étonner par Prudence.

Franck Vergeade


Jusqu’à présent, il faut bien l’avouer, Prudence portait bien mal son nom. Depuis près de six ans, on était toujours en train de s’interroger sur les motifs qui avaient poussé Joris Clerté, ex-débutant prometteur, auteur de démos ayant suscité, en leur temps, une curiosité bienveillante, à sortir un premier album mitigé de pop mignonnette sur une major, et à se retrouver, de facto, sous la coupe d’un partenaire industriel aux attentes et aux exigences forcément décalées par rapport au potentiel commercial de chansons sympathiques mais encore pataudes. Clerté aura payé au prix fort cette imprudence inaugurale. Désormais convaincu qu’il ne pourrait exercer son modeste apostolat de bricoleur de notes en toute tranquillité que sur une structure plus sensible aux charmes atypiques de ses petits mobiles sonores, il parvient à faire le meilleur usage de cette liberté fraîchement conquise. Il en profite alors pour élaborer enfin un monde faussement naïf, vraiment original, où le dépouillement des arrangements et le recours aux motifs minimalistes d’instruments-jouets comeladesques n’altèrent jamais la richesse d’un propos dense, que l’on devine mûrement réfléchi. Avec ses mélodies et ses rythmes brisés, ses petites poésies polyglottes et souvent rigolotes, Mumsmums possède une joie et un élan communicatifs. On s’y déguise en cow-boy (Contact Saloon), en trappeur (Chasse Gallery) ou en chanteur de variét’ ritale (Lunatika), avec un sens du jeu et de l’humour bienvenu. Autrement plus efficace pour retrouver avec nostalgie son enfance trop vite évaporée qu’une soirée avec Casimir.

Matthieu Grunfeld
--------------------------------------


Le monde de la musique - Février 2004


Pour dire « miam miam » en suédois, on dit « mums mums ». C’est le titre qu’a choisi Joris Clerté pour le deuxième album de Prudence, cinq ans après un premier disque que l’on avait classé quelque part entre William Sheller et Dominique A. Ici, on serait plutôt entre la Björk hivernale et douillette de Vespertine et les précautions d’enfant têtu de Pascal Comelade. Il y a de vraies chansons et des plages instrumentales, des instants de pureté (une guitare, une voix, quelques gestes ténus) et des buissons qui entremêlent couches et fils musicaux, bribes de dialogues et jouets d’enfant. Résolument inclassable, ce disque est à la confluence de dix orientations possibles dans la musique d’aujourd’hui. Ainsi, dans le court Paroles d’honneur, on entend une gouaille à la Renaud, le mépris de soi de Miossec, le détachement formel d’un Dominique A, la sophistication sonore d’un Bashung épaulé par Jean Lamot… Evidemment, se pose la question de l’autonomie de ce disque par rapport à son époque, de la pérennité de ce son une fois que ce sera dissipée la séduction de nouveauté des apparentements imprévisibles que libère massivement l’électronique (les cadavres exquis ne sont-ils pas ce qui a le plus mal vieilli de tout le surréalisme ?). Sans que l’on puisse – évidemment – trancher en cette matière, il faut reconnaître à Prudence une liberté d’inspiration et de parenté qui tend à démontrer que la démarche artistique est sincère, réelle et libre. ****
Bertrand Dicale
--------------------------------------


Libération - 23 Janvier 2004


On pourra bientôt commencer à compiler les interventions d’Armelle Pioline, parallèles au groupe Holden. Pour continuer de l’entendre respirer au coté de Jean-Louis Murat ou sur la guitare de Thomas Dutronc. Car dès qu’elle est là, les chansons adoptent une tonalité aux attraits opaques, insidieux. Pourquoi d’ailleurs se laisse-t-on prendre puisque sa voix n’a rien d’époustouflant ? C’est justement loin du clinquant que tout se joue, dans la beauté des choses banales, dans le charme accidentel des premières fatigues, timbre traînant, légèrement grave, distancié, avec cette pointe de dédain qu’arborent comme un voile de protection ceux qui ont déjà trop pris. Alors, elle apparaît sur la troisième plage du deuxième album du trio Prudence, et on tend l’oreille au moment de s’assoupir dans le confort instrumental. C’est une chanson toute simple, pleine de points d’interrogations. Entre les lignes d’instruments-jouets, un joli jeté naïf électro-pop, style Yann Tiersen. Les petites mélodies matinales de Prudence sont attachantes, pourtant on s’agacerait que ces jeunes gens doués se satisfassent si vite d’eux-mêmes. S’ils restent en surface c’est probablement parce qu’ils se soucient trop de ce qu’on pensera d’eux. Et parce qu’ils craignent de paraître mièvres, la première phrase de leur histoire, c’est une copine qui la chante à leur place.
Ludovic Perrin
--------------------------------------


ARTE Sélection CD


Pop enfantine : Prudence
Collectif placé sous la houlette de Joris Clerté, Prudence vient de signer un deuxième opus, proche d'une BO pour comédie musicale inconnue, légère, mais pas innocente, à base d'instruments pour gamins et d'instrumentaux cinématographiques.

Nul besoin d'une quelconque mise en garde avant l'écoute de l'album de Prudence, le gourmand Mumsmums. Riche en surprises et en idées, minimaliste par ses choix esthétiques, cet album se compose de ballades instrumentales ou chantées (dans différentes langues). Idéal pour habiller musicalement un film rétro futuriste, qui se déroulerait quelque part entre les 60's et aujourd'hui. Pas anodin, la présence ici d'Olivier Libaux, auteur de la vraie fausse comédie musicale audio L'héroïne au bain. Sur Mumsmums, chez Libaux, tout comme chez Jacques Demy, on parle en chantant, on se questionne quant aux directions prises dans sa vie : "Choisir le oui ou bien le non/Soit la montagne soit l'horizon" (À tort ou à raison). Ceci sans omettre de glisser quelques touches d'humour : "Matière grise en réunion de cellule/Décision prise et jamais ne recule" (Matière grise). Les nombreux participants à Mumsmums jouent du xylophone, de l'accordéon, de la batterie ou des instruments jouets (piano, guitare), comme Pascal Comelade, référence principale.
Avec ses envolées hispanisantes (Contact Saloon), ses chansons en italien (Lunatica), ses réminiscences enfantines (Tocando La), ses perturbations électroniques et ses samples divers, Prudence fait de la pop "marshmallow", multicolore et appétissante.

Prudence…
"À la base, je suis réalisateur, mais j'ai commencé la musique vers 18 ans, plus attiré par la chanson. J'ai fait un 4 titres autoproduit en 1996, puis j'ai signé chez Sony en 1997 et sorti un album éponyme en 1998 sous ce même label. Mumsmums est le second disque de Prudence, mais chez un indépendant. "

La musique…
"Souvent je viens avec une idée simple, un riff, un bout de mélodie, puis nous construisons le reste du morceau ensemble, avec mon comparse Emmanuel Enault, avec une guitare et un carillon ou un petit clavier qui sonne faux, mais dont le son nous touche. Pour le reste de la production, nous travaillons par couches, comme un château de cartes. Nous avons beaucoup employé la boîte à rythme à cause d'une part d'un problème de place (va installer une batterie dans 15m2 dans un immeuble parisien !), et d'autre part parce que nous manquons un peu de rigueur métronomique. Avec les programmations, pas de problème de fluctuation du tempo… Nous trichons comme tout le monde, en utilisant des samples. Nous cherchons, nous farfouillons… Cela nous amène sur des choses hasardeuses et le hasard a souvent du talent, c'est très excitant. En revanche, pour contrebalancer, nous appelons des musiciens (des vrais), pour assouplir, pour réchauffer. Tout ça est une histoire d'équilibre. "

La chanson…
"La chanson est plus concrète, on y place plus facilement un message. Je tire plus des textes sur mon entourage que sur moi-même. Quand je parle de moi, j'ai plutôt tendance à écrire en négatif. Paroles d'honneur en serait un exemple. "
Emmanuel Dosda
--------------------------------------


POPNEWS - février 2004


A titre déroutant, disque surprenant. Pour ce nouvel album, Prudence a radicalement changé d'ambition musicale. Si le premier opus du groupe de Joris Clerté prenait la forme d’une quête acharnée de la chanson pop francophone parfaite, ce nouvel arrivage fait plutôt le pari d'une inspiration débridée et du débordement des carcans musicaux. Aussi, les 14 chansons qui composent le disque apparaissent-elles comme autant de cartes postales rêveuses affranchies des règles inhérentes au traditionnel format pop. Quasiment entièrement instrumentale, cette collection d'enluminures très ouvragées révèle un savoir-faire musical certain. Pourtant et malgré cette complexité des arrangements et de la production, les chansons sont imparables, évidentes. Au fil de l'écoute, les références fusent et s'entremêlent, ici les Beach Boys et les Nits, là Migala ou encore Pascal Comelade. Finalement, ce que Prudence a perdu en loquacité, le groupe l'a gagné en finesse et en sens de l'à-propos instrumental. Il faut néanmoins noter que les morceaux chantés sont particulièrement bien troussés, preuve que l'économie des mots peut être parfois salutaire à la pertinence des idées (on pense à particulier à cet envoûtant "A tort ou à raison" chanté par Armelle Pioline, chanteuse de Holden). Définitivement étonnant, ce disque a la saveur des oeuvres à tiroirs qui permettent à chaque auditeur de faire sa propre lecture des aspirations de l'auteur. Réussi.

Refau
--------------------------------------


Hot Fidélité


A clip magnifique chanson superbe, qui en plus de distiller une mélodie minimaliste pas chiante fait la part belle à Armelle Pioline de Holden. Le reste de l'album Mumsmums, majoritairement instrumental, vaut également le détour.
--------------------------------------


Chronic’art


Prudence, groupe français à géométrie variable monté autour de Joris Clerté (et bénéficiant ici de talentueux invités : Mocke et Armelle Pioline de Holden, Olivier Libaux, …), délivre avec Mumsmums un petit bijou de pop délicate, qui nous rassure sur les envies d'harmonies et de beauté des musiciens d'ici et aujourd'hui. Avec ses vignettes ludiques et finement ouvragées, entre Etienne Charry simple, Ennio Morricone cheap et Pascal Comelade gai, ce deuxième album relève le défi d'une production française de qualité, qui ne se chante pas forcément. Pas très loin des vignettes instrumentales des Beach Boys, les 14 titres de Mumsmums se déclinent avec ou sans voix, toujours pour le meilleur du son et de sa répartition dans l'espace. Coloré, colorié et dessiné précautionneusement, A tort ou à raison par exemple est une belle réciprocité entre musique graphique et images musicales (chanté par Armelle Pioline et clippé par Joris). On regrettera juste parfois les inserts électroniques, moins jolis que les jouets d'enfants, dans ce foisonnement harmonieux de textures lumineuses. Quand il s'épanouit et laisse au silence ses intervalles, ce disque fait du bien aux oreilles.

Wilfried Paris
--------------------------------------